Des clous ! la neige a fondu ! (62è Neige & Glace)

Bob d’Automag    2016-02-24 21:01:46   

Le 62ème Neige & Glace 2016 en Trabant !


Engager une TRABANT dans le NEIGE & GLACE était une idée un peu décalée ! Surtout après avoir visionné les images de l’édition 2015 où l’affluence de neige était de mise. Mais chez Automag nous aimons les défis humains et mécaniques, alors, lorsque j’ai téléphoné à Viviane Zaniroli pour lui demander si nous pouvions participer au 62ème Neige & Glace avec une Trabant P601, elle a d’abord dû croire à une blague car il y a eu un « blanc » … allo, allo, non la ligne ne s’est pas coupée … « mais c’est avec plaisir que je vous accueillerai à Malbuisson  » me rétorquait-elle d’une voie enjouée.
C’est vrai, il faut les comprendre ces organisateurs : jeter une Trabant dans une meute de PORSCHE, de BMW et OPEL Ascona, … çà peut foutre un sacré trouble dans le jeu !

En route pour l’aventure …

Photo Philippe Fugier

De notre côté, nous étions plutôt confiants, car la petite avait déjà fait ses preuves de fiabilité l’an dernier au Monte Carlo Historique (il est vrai sans trop affronter la neige !) et même si sous le capot moteur on ne trouve pas l’âme d’un pur-sang, mais quelques chevaux Teutons des campagnes de l’Est. La légèreté et la robustesse de la Trabant pourraient être de bons atouts pour notre aventure.

Dans l’après-midi du vendredi 29 Janvier, nous prenions la route vers l’épreuve qui devait être la plus sportive des hivernales : le 62è Neige & Glace !

A Calais, Jean-Maurice DUHAUT (le propriétaire de la Trabant) avait déjà chargé la monture sur la remorque. Il ne nous restait plus qu’à se laisser guider par l’autoroute jusqu’à destination, nous avions prévu de faire escale à Reims pour saluer nos compatriotes belges engagés au Monte Carlo Historique à bord d’un Taxi Anglais (il y-a des plus fous que nous !!). Une soirée de départ sous la douceur, il faisait 10° à 21h00, incroyable et nous sommes fin Janvier ! Je passe une petit coup de téléphone à notre hôtelier à Rochejean (dans le Doubs) … « oui il y a encore un peu de neige sur les hauteurs, mais les routes sont bien dégagées » … ouaip, c’est justement ce que je craignais, de la douceur et des routes pas enneigées. Nous trinquons au champagne à notre aventure et rêvons de gros flocons.

Le Doubs sous la pluie !

Le lendemain nous arrivons en Franche-Comté, c’est une pluie fine qui nous accueille et qui va nous suivre pendant 3 jours. Martial, le jovial tenancier des Gentianes à Rochejean, nous affirme n’avoir jamais vu pareille condition climatique depuis 50 ans. « Normalement nous devrions avoir plusieurs mètres de neige », il tend la main vers une photo accrochée au comptoir « cette année-là nous avons eu 10 mètres de neige accumulée », « on a du rechercher la voiture d’un client avec la sonde à avalanche ! ». Mais mais, on croirait entendre un Marseillais … oups un bon conseil, ne parlez jamais de Marseille ni de Ricard à un habitant du Doubs, hààà non, mon bon monsieur, ici on ne boit pas de pastis, on boit le « Pont » (NDLR : le « Pont » est un apéritif anisé fabriqué à Pontarlier, qui était autrefois la capitale de l’absinthe, mais ça c’est une autre histoire).

Photo Eddy Coppée

Une fois les formalités administratives réglées, nous passons la Trabby au contrôle technique, il faut souligner au passage l’efficacité de l’équipe organisatrice qui s’occupe même de placer les autocollants de portières et l’autocollant « pneus cloutés » sur l’arrière, le placement du Tripy et sa sonde qui calculera la régularité de nos passages aux points de contrôles inconnus des concurrents.

Cette année Patrick Zaniroli, toujours à l’écoute de ses concurrents, a remis le road-book complet avant le départ de l’épreuve, ce qui permettait aux copilotes de préparer les spéciales et de surligner les courbes à prendre et ajouter des notes de changements de moyennes, ce que j’ai fait attentivement tel un copilote novice.

Les mieux équipés, eux, encodaient les moyennes dans leur Blunik. Et les discussions étaient lancées, au café des français, sur l’usage des moyens modernes dans les rallyes historiques … faut-il faire une catégorie spéciale pour les « Blunik », bah alors tu peux faire une catégorie avec les voitures équipées de rampes Led ! Il faut préciser qu’au Neige & Glace il n’y a pas de restriction sur les moyens techniques utilisés, qu’ils soient mécaniques ou électroniques. Le rallye se joue principalement sur les spéciales de régularité avec beaucoup de prises de temps via le Tripy embarqué, et la neige fait la difficulté à tenir les moyennes.

Trabant P601 LS (Photo Thierry)

Et justement, cette année, la neige n’était pas au rendez-vous, cela allait changer la donne et notre avantage « légèreté sur neige & glace » s’évaporait comme le brouillard au soleil. Le briefing du metteur en scène, Patrick Zaniroli, le confirmera : « pas de neige sur le prologue  », mais demain clous obligatoires parce que certaines zones forestières risquent d’être verglacées. Et le gentil organisateur terminera son briefing par une petite recommandation destinée aux concurrents de la moyenne haute à propos de la Trabant « vous ne me la poussez pas ! Soyez gentleman driver  ». (il devait tout de même ressentir une petite inquiétude …).

Nous déciderons de laisser des pneus légèrement cloutés tout au long du rallye, premièrement parce que nous n’avons pas d’assistance et secundo ce ne sont pas les 26 chevaux de la Trabant qui vont la mettre en travers à chaque virage. (NDLR : et le choix était bon).

La nuit du Prologue !

L’épreuve du prologue de dimanche soir ne servira uniquement que pour définir l’ordre de départ du lendemain. Il n’y avait donc pas lieu de se mettre le stress, et pourtant l’on sentait le poids de cette attente lourde avant le départ. Le prologue consistait en une course de côte, celle du Larmont, et sa descente sur l’autre versant de la montagne. Les habitués connaissent, mais pour bousculer le jeu des reconnaissances, Patrick Zaniroli avait décidé de faire la montée en sens inverse. Malin comme un renard du désert le patron !

Pour la petite Trabant, la consigne était simple : il fallait lâcher tous les chevaux dès le départ et garder le pied au plancher jusqu’au sommet (où l’on arriva avec presque pas de secondes de retard) et puis se laisser réguler dans la descente. Au terme de cette première épreuve nous prendrions le départ en 26ème position le lendemain. D’abord les véhicules 4 roues motrices, ensuite les moyennes basses et puis la meute des moyennes hautes avec les Porsches, BMW, Escort, Datsun 240Z, Lancia Monte Carlo …

De retour à notre hôtel, nous sympathisons avec d’autres concurrents logés à l’enseigne des Gentianes. Une Opel Manta 400 de 260cv allait partager l’écurie avec la Trabant et ses 26cv (un zéro de moins) ! L’équipe de LLM Mecasport était en place avec une RS 2.7L, et Marc DUEZ avec Francis LEROY allaient compléter la tablée.

OPEL MANTA 400 Philippe DELATTE - Ward HANSSENS

Philippe DELATTE le propriétaire de la Manta est un adepte de la glisse, et il en est à son 3ème rallye de régularité. Epaulé par Ward HANSSENS qui aura pour mission de calmer les ardeurs de son pilote tout au long des spéciales « Philippe attaque … doucement, mais doucement !!! » … vous pouvez imaginer que les histoires de fin de journées sont pleines d’anecdotes amusantes et l’ambiance très détendue.

Je me suis marié en Trabant !

Justement, puisqu’on est aux anecdotes, j’en ai une belle à propos de Marc DUEZ … « alors Marc, toi qui as conduit tant d’autos de courses dans ta belle carrière de pilote, tu n’as jamais conduit de Trabant ? » … et là je vois un sourire apparaître sur le visage du grand mousquetaire … « si, je me suis marié dans une Trabant !  » … un silence suivi d’éclats de rires généraux !!

C’est bien vrai ! A l’époque Marc Duez était en contrat avec TOYOTA, et lors de son mariage ses amis lui avaient offert une Trabant décorée aux couleurs du Team de l’époque. Voilà les deux jeunes tourtereaux embarqués dans leur Trabant sous les lancés de riz. Et c’est là que Jean-Maurice demande « et qu’est devenu la Trabant ? », « oh elle est restée 4 ans dans l’herbe à côté de la maison, jusqu’à ce qu’un gars m’a demandé si elle était à vendre. Je lui ai offert avec plaisir, et au moment où j’ai ouvert la portière je me suis rendu compte que tous les grains de riz avaient germé avec l’humidité et la chaleur … une vraie rizière !! ». HAHAHA !

Le Jura en mode Rallye !

Lundi 1er février, le rallye commence vraiment avec les spéciales autour de Malbuisson à travers les routes forestières du Jura. Pas vraiment de grosses difficultés, mais une attention de tous les instants est nécessaire, les changements de moyennes sont multiples et le travail du copilote ne lui permets pas d’apprécier le paysage.

Photo Eddy Coppée

Dans la Trabant, nous avons un bon vieux HALDA Twin et un TerraTrip, c’est la première fois que j’utilise un Terra et je me rend compte que j’ai du mal à le caler sur sa moyenne. Résultat on prend du retard et parfois de l’avance, çà c’est un comble ! Arrivés à l’étape d’Arbent les premiers résultats tombent déjà (quelle efficacité !).

Les belges sont aux avant-postes, Marc Van Dalen & Julien Minguet prennent les commandes du rallye. Avec une expérience de trois épreuves Marc est satisfait du travail du copilote et de l’électronique Blunik. Ils devancent Gonin père & fille et Morosini-Rainisio. Blaise-Sevrin sont quatrième sur la Porsche. Les écarts sont serrés, la configuration ne permettant pas de faire la différence, mais bien d’accumuler les points en cas de mauvais calibrage. Les belges trustent les vingt premières places, mais rien n’est fait.

Photo Philippe Fugier

Le hurlement de la Trabby, la nuit au fond des bois …

Mardi 2 février, la pluie fine est toujours présente pour les 342 Km à parcourir pour rejoindre ORNANS. Certaines spéciales ont un tracé magnifique, avec de petits chemins à flanc de montagne et même une traversée de piste de ski ! Le petit bi-cylindre de la Trabby lançé à 10.000 tours hurle dans la forêt. Encouragé par les applaudissements du public, Jean-Mô relance la bête à chaque épingle et jamais « la petite » n’a rechigné à la tâche … les pouces levés des spectateurs nous faisaient chaud au cœur.

Photo Eddy Coppée

Super accueil sur la place d’ORNANS pour le départ de la spéciale de nuit longue de 118 Km. Beaucoup de curieux viennent inspecter la petite voiture de rallye, on nous pose des questions : « c’est une DKW ? non une TRABANT » « C’est une 3 cylindres ? non 2 suffisent ☺ » « C’est un moteur deux-temps ? Oui mon bon monsieur  » ect … c’est clair, la plus petite de la bande crée l’émerveillement.

A propos du carburant, la Trabant fonctionne avec de l’essence 2 Temps qu’il faut mélanger dans des bidons avant de remplir le réservoir (pas de système autolube donc). Le réservoir d’origine est placé sous le capot moteur et alimente le carburateur par gravitation (pas de pompe) mais n’a qu’une contenance de 25 litres !! Si l’on sait que Jean-Mô a le pied lourd et que la consommation en mode rallye tourne autour de 10 litres/100 … on ne va pas aller loin avec un plein. Pour remédier au problème, notre mécano de génie a trouvé une solution efficace : placer un second réservoir, récupéré sur une Talbot Samba, dans le coffre et une petite pompe électrique actionnée au tableau de bord remplira le réservoir avant. Avantage : on fait le plein le matin et on ne s’occupe plus des stations-service durant la journée, le mélange est bien secoué par les épingles et les virages serrés des spéciales. Efficacité rustique !

Le départ de la spéciale de nuit se fait par un petit slalom entre les bottes de paille, et à sa sortie les spectateurs sonnent les « cloches de vaches » pour les pilotes les plus spectaculaires. Et nous voici repartis pour 118 Km dans la nuit noire, sur des spéciales forestières, dans la boue, qui avaient un petit air de R.A.C. Rally.

Photo Philippe Fugier

Van Rompuy-Vanoverschelde vont s’imposer au terme de cette journée devant Horgnies- Noelanders et Morosini – Rainisio. Les écarts sont infimes et ne permettent pas de donner un favori.
La troisième étape sera décisive et on annonce le retour de la neige.

Enfin la neige fraîche, et du sport dans la dernière RT !

Photo Philippe Fugier

Mercredi 3 février, la neige tombe à gros flocons, déjà 5 centimètres en matinée, cela ira jusqu’à 15 cm l’après-midi. Les concurrents naviguent autour de Pontarlier en matinée, sur le temps de midi c’est la panique dans les assistances « changer les pneus par des Burzet ou pas ? » A l’hôtel du Lac, Henri Pescarolo téléphone à son assistance « on change les pneus » … cinq minutes plus tard après avoir scruté le ciel il téléphone à nouveau contre-ordre « non, on laisse les pneus ».

Photo Philippe Fugier

Erreur ! Ce que « Pesca » ne savait pas, ni les autres concurrents d’ailleurs, c’est que la dernière spéciale que nous réservait le metteur en scène Zaniroli serait particulièrement bien enneigée. Et pour cause : quelques jours avant le rallye, avec la complicité d’un tracteur local, il est allé bloquer le passage de la dernière spéciale forestière de Rochejean par une congère imposante, préservant ainsi la couche de neige jusqu’au dernier moment ! (quand je vous dit qu’il est rusé !). Le résultat, c’est que la pluie qui est tombée les deux jours précédents, et le gel de la nuit, ont formé une épaisse couche de glace, recouvrez ceci d’une fraîche couche de poudreuse vous obtenez un gâteau glacé à consommer avec des Burzets pour une superbe finale de rallye hivernal.

Photo Philippe Fugier

Effectivement, dans cette dernière RT c’est BAUGNEE-REMION avec une MGB montée en Burzet qui fera le meilleur temps, Michel CLOSJANS et Robert RORIFE avec la Porsche 356 feront le 3ème temps. HOLVOET-VANOVERSCHELDE et DEFLANDRE-GULLY font une belle remontée dans le classement, ils ont trouvé dans cette ultime RT un terrain qui leur convient mieux.

VAN PEER-CHAPA remportent ce grand rallye avec leur BMW 2002 Tii

Au final, huit belges sur dix prennent les premières places. VAN PEER-CHAPA remportent ce grand rallye avec leur BMW 2002 Tii, MOROSINI-RAINISIO /OPEL Kadett GTE montent sur la seconde marche du podium, HOLVOET-VANOVERSCHELDE complètent le podium général.

HOLVOET-VANOVERSCHELDE complètent le podium général

Quelle surprise lorsque nous entendions l’appel de notre nom pour recevoir le « prix spécial Subaru », ce prix que l’organisation a décidé d’attribuer à « l’équipage de la Trabant » pour avoir osé engager une auto si particulière, et qui à trouvé sa place dans le rallye. La Trabant se classe 58ème au général et 5ème dans sa catégorie des moyennes basses.

Photo Eddy Coppée
"En souvenir du Neige & Glace, et vive la Trabant." (Henri Pescarolo)
"Je me suis marié en Trabant, mais la tienne est Top !" (Marc Duez)

Bravo à toi vaillante Trabby, tu es loin d’être ridicule et surtout tu as su gagner toute la sympathie des concurrents et du public émerveillé. Merci à Jean-Maurice Duhaut de m’avoir emmené dans cette belle aventure.

Un grand coup de chapeau à cette organisation formidable, et merci à tous ces bénévoles pour avoir bravé le froid pour notre plaisir.

Bob d’Automag

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Vos commentaires

  • Le 25 février 2016 à 13:36, par Desmet Jacques-André En réponse à : Beau récit...

    ...Sur une belle épopée avec un vieille dame, félicitations à vous deux pour votre palmarès.
    JAD du SCSC

  • Le 26 février 2016 à 02:07, par Jacques En réponse à : Des clous ! la neige a fondu ! (62è Neige & Glace)

    superbe petite voiture avec le bruit en plus de sont 2 cylindres 2 temps j’adorre !!!

  • Le 27 février 2016 à 16:53, par Jcharl En réponse à : Et que vive l’originalité !

    Salut JeanMo, je vois que le MontéCarl de l’an dernier ne t’a pas guéri des escapades neigeuses et fort heureusement ! Félicitations pour cette course et au narrateur pour nous l’avoir aussi bien faite revivre. Amitiés.

  • Le 3 mars 2016 à 17:21, par René BEYERS En réponse à : Des clous ! la neige a fondu ! (62è Neige & Glace)

    Fantastique aventure Bob ,..
    quand à moi j’avais eu l’occasion d copiloter notre regretté Christian Boileau sur la même petite Trabant .

  • Le 4 mars 2016 à 16:52, par Bob d’Automag En réponse à : Des clous ! la neige a fondu ! (62è Neige & Glace)

    Oui René je me souviens ... un Break Trabant avec le phare sur le toit :-)

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