Le propriétaire : Christian Seutin.

« Je termine mes études techniques aux Arts et Métiers de Virton, niveau A2. Toute ma carrière se déroule au service du dépoussiérage industriel d’une société suédoise dont le but est de capter toute poussière émise dans n’importe quelle application ( ciment, charbon, diamant,…) pour préserver la santé du personnel. Comment ? En installant des aspirateurs, des gros aspirateurs et des très gros aspirateurs, certains avec des filtres aussi gros que ma maison, comme pour l’industrie sidérurgique. Mon travail consiste à installer, contrôler et assurer la maintenance en Belgique et en Europe. Je suis à la retraite depuis 2009.

La technique m’a toujours intéressé parce que mon père avait un atelier de ferronnerie : tournage, fraisage, soudure. J’ai appris ainsi et j’ai passé ma vie avec la clef à molette et le chiffon en mains. Je garde un petit atelier pour entretenir, réparer ou créer.

Ceci explique mon engouement pour la mécanique, pour les vieilles voitures. Jeune, je n’ai pas eu de vélomoteur. Avec mon père, nous avons construit une petite voiturette que j’utilise pour aller au cinéma dans le village voisin. Elle a traîné et pourri dans le jardin. Pour mon service militaire, j’ai acheté une VW Coccinelle de 1956, une ovale. Puis une Mini. A l’époque, on ne gardait pas les voitures. Mon frère a commencé à rouler avec une Peugeot 202 décapotable, un vrai bijou !

Peugeot 202 cabriolet.

Pour en revenir à la voiturette, le châssis tubulaire est pourri. Je récupère les trains avant et arrière et reconstruis le tout, avec un moteur de Vespa, un 180CC à quatre vitesses, pédales d’accélérateur, de frein et d’embrayage. Le train avant provient d’une Fiat d’après-guerre. Les roues sont de 4 pouces. Nos trois enfants ont appris à conduire sur ce véhicule. Après cet apprentissage, la voiturette reste dans l’abri pour plusieurs années. L’an dernier, ma fille me dit : ‘Tu dois remettre le go-kart en route pour l’anniversaire de Maurice.’, environ deux mois avant l’échéance. Le défi est lancé. Faire tourner le moteur, peindre le châssis, placer un nouveau siège. Et le jour de l’anniversaire, le go-kart est prêt. Il est descendu de la remorque à proximité de la maison et arrive en pétaradant. Quel plaisir tout l’après-midi de voir les enfants rouler et s’amuser. »

La voiture : Dodge Brother Six.

La voiture.

« Je possède la voiture depuis quelques années, c’est la première pour moi et la concrétisation d’un rêve. Mon cousin a fait une carrière de colonial en Afrique et à la fin de celle-ci, il a trouvé la voiture dans l’île de Sao-Tomé, ancienne colonie portugaise dans le golfe de Guinée. Mon cousin a de l’or dans les mains. Mécanicien, électricien, il a géré seul une plantation d’huile de palme. Il a trouvé la voiture dans une bananeraie et il l’a achetée à une vieille dame pour un peu d’argent, un frigo et quelques bocaux de prunes.

Sao Tomé.

La voiture est une Dodge Brother Six, six cylindres en ligne, 1929, 3400CC, 63 CV, soupapes latérales. Je présume qu’elle est venue des E-U au Portugal et dans l’île de Sao-Tomé par après. Elle était sans doute une limousine et a été adaptée comme petit camion.

Le manuel est toujours présent depuis 1929.

En 1996, l’expédition en Belgique n’a pas été facile. La voiture a été découpée en 2 parties. Pourquoi ? Simplement parce que les planches pour construire la caisse de transport ont une longueur de 3,5M ! De plus, deux mois après le départ vers Anvers, un employé prévient mon cousin qu’un colis est arrivé pour lui au port de Sao-Tomé. Son envoi est de retour à la case départ car le dédouanement n’a pas été fait correctement. La Dodge revient à Anvers et après les formalités, arrive à Chiny, petit village natal de mon cousin. Il commence alors le projet de sa retraite, la remise en état qui dure trois ans. Il achète un tour pour usiner certaines pièces. Les éléments en bois, il les reconstitue aussi. Je l’aide pour des bourrages, des garnitures de freins, des silent-blocs. Il assure ce travail seul en concevant des systèmes de levage pour les pièces lourdes. Le moteur est revisé par un atelier spécialisé de Marbehan. Vers l’an 2000, il immatricule la Dodge et roule lors de concentrations, de petits rallyes.

Mon cousin possède plusieurs voitures anciennes, une Dauphine, une Plymouth, une Mitsubishi des années 70 ressemblant à la Ford Mustang. Pour un rallye Neufchâteau-Bastogne-Habay-la-Neuve, il m’invite à piloter la Plymouth et nous y participons ensemble.

Le temps passe, mon cousin est mon aîné de 14 ans et éprouve plus de difficultés à sortir ses bijoux. Ma sœur m’apprend qu’il a rentré ses plaques d’immatriculation et envisage la vente de ses voitures. Je ne souhaite pas que ces bijoux arrivent n’importe où. Je lui fais une offre pour la Dodge et il l’accepte. La voiture arrive chez moi en octobre 2011.

Je remplace le roulement arrière gauche, la suspension à lames, le carburateur que j’ai cassé en le nettoyant, la pompe à eau et les bourrages.

J’ai toujours un problème au niveau des moyeux arrière que je vais faire usiner. Je passerai bientôt au contrôle technique. Pour un véhicule comme le mien, il faut un extincteur, un triangle, des feux et des freins.
Bref, c’est permanent comme entretien. Si vous avez les moyens financiers, vous pouvez laisser votre voiture chez des experts et vous aurez un véhicule en parfait état. Sinon, vous mettez les mains dans le cambouis… »

Quelques remarques :

• Le frein à main agit sur l’arbre de transmission et non sur les patins des roues.
• Le bidon de réserve d’essence est un bidon d’huile pour l’entretien des fusils de l’Armée Française de 1914.
• Les ampoules actuelles sont récentes. Auparavant, il s’agissait d’ampoules 6V et l’installation était en 6V. Tout a été modifié en 12V, la génératrice est un alternateur actuel.
• Le radiateur est arrivé avec une réparation ‘africaine’ au ciment.

Philippe Haulet.